En vos mots 807
La scène peinte par l’artiste biélorusse Valentin Gubarev m’a tout de suite fait sourire. Aura-t-elle le même effet sur vous? Vous rappellera-t-elle quelqu’un?
C’est ce que nous saurons dans une semaine, et pas avant, lorsque tous les commentaires déposés sur cette toile seront validés. Vous avez donc plus que le temps de lire les textes qui ont animé la scène livresque de dimanche dernier et d’écrire quelques lignes.
D’ici là, oubliez l’aspirateur, prenez un livre ou faites la sieste. C’est avec joie que nous vous lirons dimanche prochain!
Aujourd’hui, c’est certain, je suis décidée à passer l’aspirateur. Il le faut bien. Depuis une quinzaine de jours que je me dis qu’il faudra que je le fasse et que, inlassablement, je le remets au lendemain. Et de lendemain en lendemain… le temps passe si vite. Le salaud!…
Mais aujourd’hui….
… Il faut juste que je m’accorde un ou deux paragraphes et après, promis juré, je m’attellerai à cette tâche ingrate.
Deux paragraphes… Pas plus. Bon… peut-être un troisième. Pour la route. Comme on dit. Puisque, après tout, je connais mes faiblesses. Mais après, sûr de chez certain, place à l’aspirateur. Vite fait. Bien fait. Aujourd’hui… sans faute.
Où en étais-je?… Ah, page 38… Je me demande bien quel peut être le secret inavouable de Laure. Elle qui, depuis l’enfance, ne connaît pas de faux pas. Pas le moindre flirt. Pas le moindre baiser fortuit. Malgré sa beauté très convoitée par les jeunes hommes qui ont le malheur de la croiser. Sait-elle les ravages qu’elle…
… Merde, l’aspirateur… Je l’avais complètement oublié celui-là… On dirait qu’il me regarde en me rapprochant mon manque d’envie d’écouter son ronronnement peu mélodieux et répétitif et qui me bousille, à chaque fois, les oreilles.
Il va devoir attendre encore un petit peu. J’ai dit aujourd’hui, alors ce sera aujourd’hui. Plus tard que prévu, mais aujourd’hui…
Page 88… Toujours son secret bien caché. Je suis certaine qu’au détour d’une nouvelle page je le saurai. Je commence à avoir quelques doutes, mais aucune certitude. En tout cas, les prétendants aussi riches et avenants qu’ils se prétendent ne trouvent pas grâce à ses yeux. Je la comprends. Elle ne veut pas s’emprisonner dans un monde d’hommes souvent médiocres et mesquins. Je ferais la même chose si j’étais à sa place. La vie est trop courte.
… Oh l’aspirateur… Il me drague ou quoi?… Son regard inquisiteur et malsain ne me laisse pas de répit. Pas moyen de lire sereinement.
Puisque c’est comme ça, il va devoir attendre. Faut qu’il apprenne que c’est moi qui donne les ordres ici.
Je fais une petite sieste et après… je me lance. Peut-être… Sinon ce sera pour demain. Sans faute.
Je m’offrirai un ou deux paragraphes. Et après… Sûr, sûr…
Comment by Armando — 10 octobre 2022 @ 5:57
La tailleuse
Elle avait taillé une bavette
Au téléphone longtemps occupé
Par une longue trop longue causette
Qui l’avait complètement épuisée.
Elle avait taillé une carotte
Pour s’en faire un très beau canapé.
Tailler lui était une marotte
Mais là elle était trop fatiguée.
Elle taillait les crayons et les haies,
Et dans ce but était bien outillée.
Tout y passait: arbres fruitiers, rosiers,
Même la barbe du jeune épicier.
Elle taillait légèrement les pages
Particulièrement appréciées
Dans le très grand nombre d’ouvrages
Dévorés, sur son divan couchée.
Ce qu’elle détestait avec ferveur,
Parce que tailler n’y avait pas place,
C’était d’utiliser l’aspirateur,
Ou d’autres engins de même race.
Elle ne tailladait d’ailleurs qu’à la main,
Bannissant l’emploi d’une machine:
Ces appareils au raffut inhumain,
Qui causent des fuites d’hémoglobine.
Là elle se taillait une sieste,
Rêvant qu’elle taillait un vêtement,
Ou imaginez vous-mêmes le reste,
Pour ce si gentil et beau garnement.
Il lui vendait carottes et courges,
Et elle lui trouvait bien du charme.
Elle aurait bien bu à sa source,
Mais elle n’avait pas les armes.
A vrai dire ce charmant garçon
Pour qui elle concevait une flamme
S’était taillé une réputation
De grand séducteur de jeunes femmes.
Elle, qui avait dans les soixante ans,
Se satisfaisait donc de ses trips,
Où Magritte avec ses cheveux blancs
Lui clignait: Ceci n’est pas une pipe!
Comment by anémone — 15 octobre 2022 @ 8:52