En vos mots 781
Alors que je viens à l’instant de valider les commentaires déposés sur la scène livresque de dimanche dernier, je vous propose de faire vivre ce tableau de Paul Gauguin en vos mots, comme vous le faites si bien semaine après semaine depuis près de seize ans.
Ce n’est que dimanche prochain et pas avant que seront validés vos textes, comme le veut l’habitude. C’est avec plaisir que nous vous lirons.
D’ici lç, bon dimanche et bonne semaine à tous!
Le livre restait fermé sur la table,
Car elle vaquait à ses occupations.
Le manque de temps était responsable.
Trop de tâches capturaient son attention.
Elle avait pris pourtant le temps de faire
Un magnifique bouquet du jardin.
Il trônait, jetant de sa couleur claire
Dans ces jours qui passent, un peu trop communs.
Demain elle reprendra le cours des pages
Interrompues à très grand regret.
Ce qu’elle suspendra sera le ménage,
Car deux jours sans lire, c’est bien trop demander!
Comment by anémone — 10 avril 2022 @ 9:46
Il a fallu une histoire d’héritage pour que je revienne là oùm il y a une bonne quarantaine d’années, je m’étais promis de ne plus jamais revenir. Quarante ans. Déjà quarante ans. Comme le temps s’évapore.
Une promesse non tenue. Encore une. Malgré cela, j’ai décidé de ne pas me juger très sévèrement. Avec le temps, même les promesses les plus solennelles se dissipent dans l’abîme de nos mémoires. La brûlure de l’enfance ne brûle plus du même feu. La tristesse remplace la douleur. Seul le souvenir de l’enfance nous fait toujours souffrir.
Avec son costume sombre et son air de croque-mort avenant, le notaire ressemble à ceux qu’on retrouve dans les histoires d’héritages.
Inquiétant et cordial, il nous annonce qu’il va lire à haute voix les dernières volontés du paternel.
Rien ne m’intéresse. Je ne veux rien.
Je lui annonce que je renonce à tout héritage, mais que, par contre, je voudrais garder ce vieux bouquin exposé au dédain et à la poussière, sur une table qui a perdu toute âme depuis des décennies. À croire qu’un jour elle a eu une âme.
Mon annonce a fait naître un sourire de bonheur chez ma sœur et mon frère, avec lesquels je partage le malheur du même sang, mais pas le bonheur du même cœur.
Pour eux, les livres sont des choses mineures et sans intérêt. Alors l’idée que je puisse les débarrasser d’un vieux bouquin les réjouit.
Ce qu’ils ignorent est que je m’accroche à mon seul rayon de soleil de l’enfance pour tromper ma douleur. Ce livre. Vieux et fatigué. Où j’ai découvert des mots que j’ai appris à épeler, avec hésitation et lenteur, mes premiers mots, sans trop les comprendre, mais en cachant cette découverte. Comme une fenêtre ouverte vers ailleurs. L’espoir d’autre chose.
Comment by Armando — 16 avril 2022 @ 4:36