Lali

4 mars 2012

En vos mots 256

Filed under: Couleurs et textures,En vos mots — Lali @ 8:00

Elle s’apprête à sortir. Le temps de fixer son chapeau, d’enfiler ses gants et elle sera en route. Pour où? Nul ne connait la destination de la lectrice peinte par Samuel Baldwin. Sauf vous. Vous qui avez pris soin de noter le titre du livre qu’elle emporte avec elle. Vous qui allez nous raconter en vos mots son histoire. Tout de suite, demain, dans quelques jours. Tant que vous le faites avant dimanche 8 heures, heure de Montréal, moment où seront validés tous les commentaires.

D’ici là, bonne semaine à ceux qui s’assoiront dans le jardin de Lali.

7 commentaires »

  1. Ce foulard allait-il bien à son teint? Elle se trouve un peu pâle ce matin.
    La nuit a été courte. Si elle veut écrire, ce ne peut être qu’en cachette.
    La journée, on se consacre aux bonnes oeuvres. A la musique. A la broderie.
    Les femmes ne sont pas censées écrire. Ou des romans à l’eau de rose peut-être?
    Elle veut parler pour les femmes. En leur nom.
    Dire à quoi elles sont obligées.
    Dire ce dont on les empêche.
    Elle veut parler des femmes jeunes comme elle et de même condition.
    Mais aussi des paysannes, des servantes, des ouvrières, de la maternité, des petites filles, des grands-mères.
    Posé sur la cheminée, le livre qu’elle voudrait voir, c’est le sien.
    Celui qu’elle aurait écrit à la lueur des chandelles, pendant les heures volées.
    Celui qu’elle publiera un jour, elle en a la ferme volonté.
    Pour l’heure, dans les apparences du moins, elle se conforme et ne fait part de ses desseins à personne.
    Ses soeurs l’attendent dans l’entrée. Elle entend les talons de la plus jeune dans l’escalier. Et les deux autres qui chuchotent, avec quelques petits rires étouffés.
    Elle ira une fois encore avec elles ce dimanche, sans conviction, à la messe.
    Elle s’en veut un peu. Quelle raison a-t-elle d’y aller, si ce n’est d’obéir aux normes?
    Si ce n’est de guetter aussi et non sans trouble, l’oeil perçant, la chevelure épaisse et l’harmonieuse silhouette du fils aîné des fermiers voisins?
    Prendra-t-il garde à sa pâleur? L’effleurera-t-il seulement du regard?
    Peu importe! Dût-il lui en coûter, elle ne sacrifiera pas pour un homme sa raison d’être.
    Elle enfile ses gants dans un soupir, et s’éloigne pensive du miroir.
    En marchant vers le vestibule, elle serre machinalement contre elle, un peu plus fort que d’habitude, son missel.

    Comment by Anémone — 4 mars 2012 @ 14:37

  2. J’avais gravé dans mes silences l’interdit de toute nouvelle rêverie. Même que le gazouillis de ma plume ne versait plus depuis longtemps de larmes sur ma feuille blanche.

    Je me foutais des rêves et des pêchés. Je me foutais du regard menteur de ceux qui vous dévisagent dans l’espoir de voir s’offrir davantage que vos mots muets et vos sourires courtois. Je vivais au jour le jour. Au gré de mes envies et des instants qui font que vous n’êtes que le fugace moment qui passe. Et c’était bien. Aucune prison. Aucun amour. Aucune haine. Aucune crainte. Juste la vie qui passe et nous mène, comme une rivière froide, vers sa fin. Quelque part on ne sait jamais vraiment où.

    Je ne m’attachais à rien. Ni à personne. Ni aux saisons. Puisque tout est éphémère. Puisqu’on est toujours seul. Même lorsque le corps dénudé des hommes se coule au vôtre. Dans un instant bref. Interrompu avant de vous avoir rassasiée. Avant de vous demander votre avis. Avant de vous demander pardon. Comme si le plaisir des corps était toujours donné à celui qui ne connait qu’une seule façon d’aimer. Et de tout oublier.

    Puis, je l’ai croisé. Puis il m’a caressé de son regard tendre. Et j’ai su à qui appartiendrait mon cœur désormais. Et je me fous de toutes mes promesses. Éphémères.

    Comment by Armando — 5 mars 2012 @ 11:10

  3. Vite, il est l’heure! Mon mantelet de soie, mon nouveau chapeau au ruban rose, mes gants paille, mon missel… Hahaha! mon missel! quelle merveilleuse idée que mon amie Armande m’a donnée là, d’envelopper dans la reliure de maroquin fauve cet exemplaire du livre interdit qu’elle m’a prêté! Et ma chère Mère qui n’y voit que du feu! Ah! si elle savait que tous mes exercices de piété ne sont que pour connaître la suite des aventures d’Emma Bovary!

    Comment by Adrienne — 11 mars 2012 @ 1:58

  4. Les missels ont eu du succès! Quoique dans les deux cas leur usage soit quelque peu détourné…

    Comment by Anémone — 11 mars 2012 @ 9:22

  5. C’est drôle il n’y que des « A »… Anémone, Armando, Adrienne…
    Est-ce une nouvelle règle Mlle Lali?… La semaine prochaine nous aurons les Betty, Basile, Blairjoy, etc.?
    OK je sors…

    Comment by Pépé Zinzin — 11 mars 2012 @ 9:52

  6. JOUR DE FETE

    Marthe nouait fermement les rubans sous son menton substantiel et vertueux.

    Ce ne serait pas respectable d’y aller sans faire preuve de sa toilette habituellement impeccable.
    Il fallait observer ses habitudes, même un jour de fête.

    Certes, elle y était habituée, elle en avait témoigné d’autres.

    Et pourtant, ses mains tremblaient légèrement et il lui a fallu trois fois pour que le noeud soit parfait.

    Oh, la première fois, oui, c’était un peu déconcertant. Elle n’avait eu que vingt ans à l’époque.
    Mais maintenant, alors, maintenant, c’était différent.

    Elle connaissait bien les rites : se préparer, s’y rendre, témoigner l’acte, et puis rentrer et prendre un petit verre d’eau-de-vie pour s’en féliciter, oui.

    À chaque fois, elle se sentait triomphale, sûre de la bonté des ses proches et fière de vivre dans un tel pays !

    Dans la glace, elle nota une petite bulle de salive qui échappait de sa bouche, et elle essuya soigneusement ses lèvres qui ne souriaent pas souvent.

    Mais bon, faudrait quand même qu’elle se dépêche un peu si elle souhaitait arriver au bon moment.

    Bien après la dénonciation, certes, et le début du châtiment – parfois les cris la troublaient encore – mais bien avant la partie la plus importante.

    Après tout, ce n’était pas tous les jours, après tout, et au contraire de tout ce qu’on disait ailleurs, ce n’était pas tous les jours qu’on pendait un des ces sales créatures !

    Comment by joye — 11 mars 2012 @ 10:16

  7. Et pourtant, et pourtant…
    Elle me plaisait bien. Je sentais son léger parfum de poudre de riz…
    J’entendais le doux froissement de la soie de sa robe bois de rose. Elle allait et venait. Les talons bobines de ses bottines faisaient craquer les lames du plancher.
    « Petit roi » jappait comme chaque fois qu’une promenade s’annonçait.
    Je lui avais tendu son chapeau en paille de riz, le ruban avait crissé lorsqu’il avait frôlé la soie de son cou.
    Et pourtant, et pourtant, je ne savais quoi écrire à son sujet.

    Comment by LOU — 11 mars 2012 @ 11:36

Flux RSS des commentaires de cet article. TrackBack URI

Laisser un commentaire