Lali

16 octobre 2011

En vos mots 236

Filed under: Couleurs et textures,En vos mots — Lali @ 8:00

Nous voici déjà à la mi-octobre. Comme chaque automne, le temps file à une vitesse vertigineuse et nous précipite vers l’hiver, ou du moins croit-il le faire. Mais ce temps qui nous bouscule semble avoir oublié la ténacité et la résistance des feuilles et des fleurs qui n’ont pas dit leur dernier mot. Des feuilles et des fleurs dont les couleurs ont peut-être laissé la lectrice peinte par l’artiste Otto Dix songeuse.

À quoi rêve-t-elle alors qu’elle lit ou paraît lire? À cette saison? À une autre? À un pays? À quelqu’un? Ce ne sont là que quelques pistes à utiliser comme bon vous semble afin de raconter en vos mots la toile de ce dimanche. Comme le veut désormais l’habitude, vos textes seront emmagasinés pour être validés dans sept jours et pas avant.

En espérant que la lectrice d’Otto Dix ne reste pas muette, je vous souhaite une bonne semaine.

5 commentaires »

  1. L’ÉCRIVAINE DU DIMANCHE

    Dans une bulle d’encre noire
    Penchée sur la page blanche
    Elle invente toute une histoire
    L’écrivaine du dimanche.

    Elle se creuse bien la tête,
    Cherche la syllabe qui rime,
    Trouve une phrase pas trop bête
    Avec un peu d’humour en prime.

    Seront mêlés aux commentaires
    Les quelques mots en quelques lignes
    D’un p’tit poème bien ordinaire.
    Vaut pas la peine qu’on le souligne.

    Flairjoy

    Comment by Flairjoy — 21 octobre 2011 @ 7:00

  2. Pendant longtemps j’ai cru que papa ne nous aimait pas. Ni moi. Ni maman. Ni personne.

    Il partait chaque maman avant le soleil et ne rentrait que le soir tard et sans dire un mot. Toujours dans cet ordre, il m’embrassait d’abord, puis c’était le tour de maman. Mais il ne nous prenait pas dans ses bras. Il ne nous demandait rien. Il ne nous disait rien.

    J’avais l’habitude de jouer seul. Je n’allais jamais chez personne et personne ne venait chez nous. On était pauvres. Trop pauvres.

    Maman m’aimait et me disait que papa avait un grand cœur et qu’il m’aimait aussi, mais qu’il était un peu gauche. Un peu rustre. Un peu trop silencieux.

    Puis un jour je suis tombé malade. C’était l’hiver. Il faisait très froid cette année-là. Le médecin avait dit d’un air sévère que je ne pouvais pas me lever. Sous aucun prétexte.

    Après un effort, j’ai entendu papa demander timidement : Et pour l’école on fait comment ?

    Ce à quoi le docteur a répondu, en fixant papa des yeux : Pas d’école. Sous aucun prétexte.

    Le lendemain, papa est parti encore plus tôt que d’habitude. Il est allé demander à Mlle Bertrande de venir à la maison faire la lecture. Papa ne demandait jamais rien à personne. Il était fier, seul et silencieux, comme le sont les chênes dans la forêt.

    Ce soir-là, j’ai su que papa m’aimait. J’ai regardé maman. Elle m’a souri. J’écoutais Mlle Bertrande me faire la lecture et je savais que papa m’aimait et que je l’aimerais toujours.

    Comment by Armando — 21 octobre 2011 @ 10:10

  3. Dans un petit village des Vosges, habite Ernestine depuis plus de cinquante ans. Elle a vécu des bons et des moins bons moments. Lorsqu’avec son mari Henri, ils découvrirent ce charmant village, ils ont décidé de reprendre la maison de la grand-maman décédée et Henri, très adroit de ses mains a rénové la maison de la cave au grenier. Leur nouvelle habitation était un petit bijou. La naissance de leur trois garçons fut un grand bonheur jusqu’au jour où Ernestine se retrouva veuve. Henri a eu un accident de travail sur un chantier dans le village voisin.

    Ernestine était inconsolable mais grâce au grand élan de solidarité de tout le village, Ernestine remontait la pente gentiment. Tous les villageois venaient l’aider. Pour la garde des enfants, le ménage, les commissions. Elle n’oubliera jamais ces braves gens lui apporter leurs meilleures recettes et le paysan habitant le haut du village venait avec le lait frais de ses vaches.

    C’est ainsi qu’Ernestine refit surface et lorsqu’elle repense aux premières années sans Henri des larmes coulent sur ses douces joues. Ses trois fils sont maintenant mariés et viennent régulièrement rendre visite à leur maman. La maison retentit souvent des rires des petits-enfants. C’est une grande joie pour Ernestine.

    Elle a toujours aimé les enfants et c’est pourquoi elle a choisi de devenir institutrice en Ardèche avant de faire la connaissance d’Henri. Après le décès de son époux, Ernestine s’est dit qu’elle devait faire quelque chose pour tous ces villageois, surtout pour les enfants dont les parents ne pouvaient pas toujours s’occuper d’eux pour les devoirs. Les travaux aux champs leur prenaient beaucoup de temps. C’est alors qu’un jour, elle épingla une petite carte dans l’épicerie du village : J’offre volontiers bénévolement des cours scolaires à tous les enfants de ce lieu. Ernestine.

    Toutes les mamans étaient heureuses d’avoir une personne cultivée qui allait s’occuper de leurs enfants. Aussitôt les inscriptions faites, Ernestine reçu ses premiers élèves. Ce n’était pas une école. Tout se passa dans la cuisine et les enfants buvaient les mots d’Ernestine et chaque matin, les enfants se levaient tôt avec joie pour aller rejoindre les bancs de la cuisine d’Ernestine. C’était très chaleureux et pour le goûter, chacun pouvait se servir d’une tranche de bon gâteau. Ernestine les regardait manger avec bonheur. Maintenant, elle se sentait sereine et heureuse. Et en regardant les petits, elle se souvient du temps où leurs parents l’on tant aidée. Sans eux, elle ne sait toujours pas si elle aurait pu surmonter son grand chagrin.

    Et ce soir, tout particulièrement, allez savoir pourquoi, Ernestine avait envie de se plonger dans l’album de photos de son mariage avec Henri… Il était si près d’elle, dans son cœur !

    Comment by Denise — 22 octobre 2011 @ 14:44

  4. « Je sais que je te raconte là de grotesques exaltations et de puériles folies. Je devrais en avoir honte, mais non, je n’ai pas honte, car jamais mon amour pour toi ne fut plus pur et plus passionné que dans ces excès enfantins. Pendant des heures, pendant des journées entières je pourrais te raconter comment j’ai vécu alors avec toi, avec toi qui connaissais à peine mon visage … » Combien de fois ai-je lu ce passage ? Combien de fois ai-je du reprendre ma lecture à ces phrases sans réussir à poursuivre ? J’avais pourtant tout prévu pour me plonger dans la « Lettre d’une inconnue », prévu le châle bleu sur mes épaules et mes cheveux retenus par le velours sombre, choisi l’emplacement pour profiter du soleil d’octobre. Je prépare toujours mes voyages avec Stefan Zweig, pour accueillir ses mots comme il se doit, ses mots, leur force, leur beauté profonde, leurs cris déchirants … Mais aujourd’hui, rien n’est pareil. Aujourd’hui, le garçon des Trois Marmots a beau me sourire, habitué, indifférent, rien n’est pareil. Oh bien sûr j’ai souri lorsqu’il a posé le thé commandé, mon coude a retrouvé comme toujours le guéridon, et ma main mon menton. Apparemment, le monde tourne toujours, comme avant. Mais mon cœur qui envahit ma poitrine, mais les battements si intenses qui gonflent cette veine à mon cou, mais les tremblements imperceptibles suspendent ma vie, emprisonnent l’air que je respire péniblement. Et je relis les mêmes mots, incapable d’autre chose. Les yeux baissés sur la page qui se dilue. Une goutte salée vient de tomber. Dans son sillage, un étonnant vacarme : un bonheur à venir, un bonheur avenir vient d’exploser !

    Comment by Chris — 23 octobre 2011 @ 4:38

  5. LECTURE

    Margot ne savait pas lire, mais elle aimait faire semblant.
    Elle aimait le texture des pages, elle aimait le noir sur le blanc, elle aimait voir filer les lettres devant ses yeux, de gauche à droite.
    Les petits points l’intriguaient. Parfois ils se plantaient derrière une lettre, parfois ils sautaient sur une petite ligne verticale. Parfois, mais plus rarement, ils soutenaient une longue ligne verticale, parfois ils dansaient un pas de deux avec un autre point, ou parfois avec un point qui avait une queue de cheval.
    Elle aimait aussi les espaces, elle les trouvait aussi importants que les traces de noir, mais sans pouvoir exactement expliquer pourquoi.
    Parfois elle osait tracer ces lignes avec son doigt. Elle aimait bien sentir courir les mots sous son indexe. Elle aimait le son de la page qui lui murmurait quand elle la prenait par le coin pour la tourner.
    Non, Margot ne savait pas lire.
    Mais elle aimait faire semblant.

    Comment by joye — 23 octobre 2011 @ 8:22

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