Des nouvelles comme autant d’extraits de films
Qui aime les nouvelles qui vont de A à Z sans retours en arrière seront déroutés par L’amour au cinéma, un recueil de huit nouvelles signé Éveline Mailhot, mettant en scène des personnages aux prises avec des situations qui ne nous sont pas présentées dans l’ordre chronologique. Cette façon de faire bouscule qui s’attend à autre chose, mais ravira les cinéphiles qui trouveront dans ce processus quelques familiarités avec le septième art.
Les nouvelles s’ouvrent donc sur des scènes qui ne mènent pas nécessairement à un dénouement, mais qui, dans la plupart des cas, en expliquent les prémices. J’avoue avoir aimé ce choix de l’auteure, même si je n’ai pas été emballée par la totalité des nouvelles ni touchée par tous ses personnages. L’idée de les installer dans le feu de l’action ou au cœur même d’une situation sans nous présenter d’abord les intervenants, en faisant des lecteurs des témoins, permet — quand c’est bien fait, et c’est le cas ici — de créer une synergie personnages/lecteurs des plus réussies.
Il est ici question du sentiment amoureux et d’intimité, mais de loin, l’auteure ayant choisi de rester à la surface des choses comme si elle avait eu une caméra entre les mains. On peut apprécier ou pas. Malgré une écriture alerte et imagée, qui laisse suffisamment de place au lecteur pour qu’il puisse imaginer ce qui est tu et qui se trame entre les scènes décrites, on pourra par contre reprocher l’absence d’un fil conducteur autre que la forme et le faux thème de l’amour suggéré par le titre.
Je retiendrai plutôt l’idée d’un recueil volontairement décousu, sorte de clin d’œil au cinéma, dont le résultat semble correspondre au projet initial de l’auteure, mais qui demeure un exercice.