Lali

28 décembre 2013

La mer poivre 1

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 23:59

Ancres d’espérance

Ma vie défile.

Prisonnier derrière les hublots
Je cherche la côte.

S’agripper quand le gouvernail est bloqué
Que l’hélice ne tourne plus
Jeter l’ancre quand le courant est trop fort
Comme dans la vie.

Ancres de lumière, ancres d’espérance
Combien d’ancres brisées sur le chemin de la destinée?

Claude LeBouthillier, La mer poivre

*choix de la lectrice d’Emmy Robbemont-Mol

La grande fabrique de mots

Filed under: À livres ouverts,Pour petites mains — Lali @ 19:56

fabrique

C’est immanquable. Dès que j’ouvre un livre des éditions Alice, je tombe sous le charme. Je suis émue. Je me sens interpellée. Bref, je deviens le temps de ma lecture une petite fille — ou une adolescente — pour qui plus rien n’existe sauf le livre qu’elle a entre les mains.

Et ça a été le cas avec le superbe album d’Agnès de Lestrade, illustré avec finesse et douceur par Valeria Docampo, La grande fabrique de mots, lequel raconte avec infiniment de poésie et tout autant de tendresse l’histoire de Philéas.

Celui-ci vit dans un pays où on fait économie de mots. En effet, on n’y parle pour ainsi dire pas. Parce qu’il faut pour pouvoir dire les mots tout haut les acheter et les avaler avant de les prononcer. Or, quels mots choisir, comment prendre la bonne décision en écartant les mots inutiles pour aller à l’essentiel quand on veut déclarer sa flamme? C’est la situation à laquelle se voit confronté Philéas. Pas question qu’il fasse un mauvais choix de mots pour dire à Cybelle qu’il l’aime!

Toute la force évocatrice des mots est suggérée, de même que la superficialité de certains autres, dans cet album qui donne aux enfants le goût des mots, des mots justes, quand il est temps — entre autres — de transmettre un message important qui ne peut laisser planer aucun doute quant à sa teneur. Ce qui nous donne un album irrésistible tant à cause du texte lui-même que pour les images époustouflantes d’une ville où les ombres jouent avec les lumières.

Un album qui devrait plaire à bien des enfants, des petits comme des grands… et qu’une certaine grand-mère de ma connaissance offrira sûrement à son petit-fils.

Lu dans le cadre du Challenge Le Nez dans les livres – Saison 2

La grande fabrique de mots a reçu le prix littéraire de la Citoyenneté 2010-2011 remis par l’Inspection Académique et la Fédération des Œuvres Laïques du Maine et Loire et le prix Papillotes 2010.
logo-challenge-tous-prix Titre valable pour le Challenge à tous prix

27 décembre 2013

Frontières 2

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 23:59

Comment réussir à emplir
le corps de qui
est absent?

(Mais les mots
suscitent l’être
relient désirs
et continent
se gorgent de proche
et de lointain)

Oui, tout cela est vrai
— Maintenant ta bouche
contre la mienne

Emmanuelle Le Cam, Frontières

*choix de la lectrice de William McGregor Paxton

Ma drôle de ville

Filed under: À livres ouverts,Pour petites mains — Lali @ 20:39

droledeville

Parfois, on a juste besoin d’un album qui fait sourire. D’un album aux illustrations fantaisistes, attrayantes et colorées à souhait. D’un album qui n’entend pas donner de leçons ou répondre à des questions. Un album tout ce qu’il y a de plus ludique, quoi.

Ma drôle de ville, écrit et illustré par Luc Melanson, est parfait pour de telles occasions. Vous y croiserez une pluie de brocolis, des autos en chocolat, un facteur roulant à bicyclette sur un nuage, des léopards dans le placard et nombre de choses si abracadabrantes que vous penserez avoir la berlue. Certains croiront même que vous inventez tout ça!

Mais si c’était vrai?

Un album qui ne prétend pas proposer autre chose qu’un moment de pur plaisir. Ce dont nous avons parfois bien besoin…

26 décembre 2013

Frontières 1

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 23:59

Nous regretterons les lèvres chaudes
et le corps qui s’anime
Nous regretterons les chambres
que nous n’avons pas eues
l’incomplétude de l’ouverture
l’inachèvement de l’étreinte
Nous regretterons
ce qui n’a pas été

Emmanuelle Le Cam, Frontières

*choix de la lectrice de Carl Schmitt

25 décembre 2013

Entre les murs 6

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 23:59

Je calfeutre mon chagrin
à la rouille de l’existence
j’emprunte
toutes les langues
pour que le monde entende
les vicissitudes de nos douleurs

Dominique Zalitis, Entre les murs de la Baltique

*choix de la lectrice de Nina Hamnett

24 décembre 2013

Entre les murs 5

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 23:59

Dis-moi
je veux l’entendre
comme une promesse
le bruit des neiges
et les vestiges du temps

Recollons
la lune et la brume dans la nuit
les ballets et les mélopées

Dominique Zalitis, Entre les murs de la Baltique

*choix de la lectrice de Jesse Dale Cast

23 décembre 2013

Entre les murs 4

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 23:59

S’asseoir
écrire mon amour
sur notre corde à linge
pour que le nord et ses vents
te ramènent
sur les chemins de Ventspils
entre les courants de la Baltique

Dominique Zalitis, Entre les murs de la Baltique

*choix de la lectrice de Tereshina Miracy Cannini

Déroutant, dérangeant, fascinant

Filed under: À livres ouverts — Lali @ 20:38

porte

Si vous aimez tout ce qui est linéaire, chronologique et sans surprise, ne vous procurez pas le premier roman de René-Daniel Dubois. Si vous n’avez pas peur de marcher sur un terrain miné, de ne pas savoir ce qui se cache derrière la porte ni d’être dérouté autant par les multiples intrigues que par un texte aux phrases pour la plupart courtes et saccadées, précipitez-vous chez votre libraire : ce livre est pour vous.

Il faut au lecteur éventuel de Porte d’entrée, qui s’annonce comme le premier volet d’une longue série, autant d’audace pour le traverser qu’en a eu le dramaturge à le construire et le peaufiner pendant près de 30 ans. Pas parce qu’il est difficile à lire, mais parce qu’il n’a rien à voir avec un roman traditionnel.

Porte d’entrée n’est pas sans faire référence au théâtre de Dubois, notamment aux personnages de Panique à Longueuil, quelque peu déjantés et aux effets langagiers de Ne blâmez jamais les bédouins, deux des pièces qui forment probablement l’épine dorsale du théâtre du récipiendaire du prix du Gouverneur général en 1984.

Mais il n’est pas nécessaire d’avoir vu ou lu son théâtre pour faire entrer de plain-pied dans le premier roman de René-Daniel Dubois. Il suffit simplement de faire confiance à l’auteur qui n’a peur de rien puisque Porte d’entrée commence par le chapitre XXI et ne nous offre par la suite que quelques-uns des 58 chapitres, ceux qui ont échappé au désastre ou à la fin du monde alors qu’un garçon voit l’homme qu’il aime se vider de son sang et qu’un autre examine le ciel d’où va venir l’invasion soviétique.

Pas très loin de là, il y a des rats qui attendent leur heure et des lecteurs fascinés qui vont de page en page, déboussolés, mais calés au fond de leur siège, à la recherche de la clé peut-être absente, qui a dû tomber d’une poche alors qu’il tournait la page. Obnubilés par le rythme, les phrases au rythme inhabituel, coupées en deux, en trois ou plus par des points, comme celle-ci :

« Le garçon aux fortes épaules.
Raconta.
Comment ce qui se produisait là.
En cet instant précis.
Tout autour d’eux.
Trouvait ses origines dans ce qu’il lui avait raconté.
Juste avant que la fin du monde ne se mette.
À déployer.
Ses ailes.
Et sa fureur. »

Ou par celles, longues, très longues, essoufflantes qui les ponctuent, l’auteur prenant plaisir à aller des unes aux autres alors qu’il déroule sous leurs pieds un univers duquel la violence est loin d’être absente, autant celle au sens propre que celle des sentiments. Jusqu’à ce qu’arrive le dernier chapitre, moins touffu, moins hors-normes, un peu moins d’une centaine de pages qui répondent en quelque sorte au premier chapitre (le XXI) et permettent de mettre fin au maelström que constitue la trame de Porte d’entrée.

Dire qu’il s’agit d’un roman facile serait mentir. Mais de là à dire qu’il s’agit d’un exercice insurmontable, nous sommes loin du compte. Porte d’entrée n’est pas pour tout le monde. Que pour ceux qui ont envie de ne pas savoir où ils vont, tout en faisant confiance à quelqu’un qui s’est peut-être perdu.

Ceux-là risquent d’être fascinés.

Texte publié dans

Titre pour le Défi Premier Roman

22 décembre 2013

Entre les murs 3

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 23:59

De tes mots muets
tu me tiens

Ton souffle en saccade
me prend en otage

Ta main dans la mienne
berce les gémissements
des corbeaux

Maintenant
nous sommes deux
pour rattraper
les mille ans d’histoire
qui nous séparent

Dominique Zalitis, Entre les murs de la Baltique

*choix de la lectrice de Lavanna Martin

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