Aussitôt lu, aussitôt oublié
« J’ai envie d’été et de départs.
De flâner, de rêver.
De dériver doucement entre la mer et les mots. »
Et c’est exactement ce que fait la narratrice de Jeune fille vue de dos pendant 150 pages qui sont autant d’instants glanés ici et là au fil de ce qui semble être une année, au cours de laquelle, désœuvrée, elle promène son mal de vivre un peu partout sur la planète, de Londres à Istanbul en passant par Lyon, sans savoir où elle va, ne se sentant jamais vraiment chez elle nulle part, et toujours prête à chercher ailleurs ce qu’elle ne trouve jamais. Ni dans les livres qu’elle dévore les uns après les autres et qu’elle mentionne au fil des pages, ni dans les lieux qui la séduisent plus quand elle songe à s’y rendre que quand elle est sur place.
« J’ai du mal à déployer mon horizon sur plus d’un mois sans projet, je suis en pointillé. »
En pointillé, mais aussi dans les marges, pas vraiment loin des clichés avec ce désir d’écrire qui tenaille la narratrice sans qu’elle n’arrive à s’y mettre, sans cesse happée par l’envie de départ, par la couverture d’un livre, par une fête qui s’organise, par des amis avec qui elle discute des heures sans avancer, mais avec cette obsession :
« Je passerais bien mes dernières années à lire,
à rêver, marcher, réfléchir,
et écrire. »
Le résultat est un roman qui a le ton du récit, proche de l’autofiction, alors qu’à l’instar de son personnage Céline Nannini ne semble bien nulle part et toujours en quête d’un ailleurs qui la retiendra et la poussera enfin à écrire. Un roman composé de chapitre très courts, le plus souvent en prose, mais parfois en vers, lesquels tiennent généralement en quelques lignes et ne dépassent pas une page et demie. Un roman décousu qui nous fait passer de lieu en lieu, de fête en fête, de livre en livre, avec détachement.
Le lecteur a en effet du mal à s’attacher à celle qui ne s’attache à personne. Malgré des jolies phrases, malgré des scènes bien décrites. À cause de certaines autres un peu bâclées ou qui semblent inutiles ou répétitives. Comme si l’éditeur avait eu peur de supprimer quelques phrases à un roman déjà court. Pourtant, le roman aurait gagné en force évocatrice si on avait éliminé les redites. Davantage encore si l’auteure avait fait autre chose que nommer les livres qu’elle lit, car elle tenait là un beau filon : lier ses livres à sa vie, à cette forme d’errance qui est devenue la sienne en attendant qu’elle trouve sa voie et sa voix.
On aurait aimé plus de rigueur dans la construction et la révision, car l’auteure a visiblement du souffle, le sens des descriptions et un réel talent pour l’écriture.
Jeune fille vue de dos se lit rapidement. Mais hélas, s’oublie aussi rapidement.
Titre pour le Défi Premier Roman
Même si les livre est décevant, j’aime bien ton billet, très bien écrit !
Comment by Anne — 16 juin 2013 @ 4:49