En vos mots 5
Qui est-elle ? Que lit-elle ?
À vous de raconter la lectrice d’Alberto Pla y Rubio. À vous de nous livrer une part de son histoire, à vous de dire ce qui se dégage d’elle. À vous, la toile de ce dimanche, la cinquième de l’aventure qui s’appelle En vos mots.
Bon dimanche et bonne semaine à tous!
En cette belle après-midi d’été, la lectrice a décidé de s’installer dans son beau fauteuil, celui qui est près de la fenêtre. Elle a tiré délicatement le rideau de voile afin d’être un peu plus au frais car il n’était pas question pour elle de sortir par cette chaleur de plomb. Pour se sentir tout à fait à l’aise, elle a revêtu sa belle robe blanche, toute légère et relevé ses beaux cheveux.
Le livre était là, à portée de main, sur la petite table et aujourd’hui c’est l’occasion rêvée de se plonger dans le roman que son amie lui a prêté dernièrement.
Elle va le lire d’un bout à l’autre, jusqu’au mot « fin » cela est sûr car dès les premières pages elle ne voit déjà plus ce qui l’entoure. L’histoire doit être belle et très prenante car cela transparaît en elle. Son beau visage dégage tant de délicatesse et finesse. Se met-elle peut-être à la place de l’héroïne ?
Comme la lectrice est heureuse et sereine car rien ne vient la perturber.
Comment by Denise — 14 mai 2007 @ 7:57
Je l’observe. Belle et sereine, en train de lire une lettre d’un ami lointain et pourtant plus proche que beaucoup de ceux qu’elle croise chaque jour. Elle, la femme combative et entière, éprise de liberté, forte et fragile à la fois, qu’aucun combat ne détruit et qui ne se confie, du bout de ses cils, qu’aux livres qu’elle lit. Inlassablement.
Pour tout vous dire, je ne la connais pas vraiment, mais il serait difficile de vous l’expliquer. Puis, il y a bien des choses pour lesquelles, se hasarder à les expliquer, ça reviendrait a se noyer dans l’océan des mots, avant la fin du voyage. Pour rien.
On s’est croisé par hasard. Parce que certaines rencontres n’ont jamais de rendez-vous. Elles arrivent parce qu’elles sont inscrites, quelque part, dans le livre inachevé du temps qui passe. Parce que dans les détours de l’existence on se retrouve un jour au même carrefour et on se regard et on s’adopte, sans trop savoir pourquoi. Parce qu’un jour quelqu’un a chanté :
« … Et le Golden Gate s’endort
Sur Alcatraz où traînent encore
Des sanglots couleur de prison. … »
Depuis, je l’ai lue quelques fois au-delà des ses propres mots, jusqu’aux murmures presque immobiles de ses silences, Je crois que, parfois, je peux deviner ce qui se cache derrière son sourire vif et timide. Faut croire que les gouts âcres des choses inachevées l’empêchent de rire aux éclats, autant qu’elle aimerait.
Elle aime s’abandonner à son univers. Là, où elle sait qu’elle peut se déshabiller sans contraintes ni retenue et ressembler à ce qu’elle est, sans s’égarer à devenir quelqu’un d’autre. Pour ne pas blesser. Par convenance.
Ce qu’elle aime c’est ça. S’abandonner à son univers. Se sentir elle-même. Parmi les souvenirs nostalgiques des choses qu’elle a aimées et que le temps, tout doucement, est arrivé à atténuer sans effacer réellement.
Seule, parmi ses bouquins, ses véritables et inébranlables amis et confidents, qui ne l’ont jamais déçue ni trahie, elle peut s’abandonner à elle-même pour être ce qu’elle est. Emporté par tant et tant de récits, qu’elle dévore et qui la transportent dans ses désirs, dans ses envies, dans ses rêves, dans ses espoirs. Dans le regard intime et complice de son miroir.
Quelquefois la musique vient, comme un invité, partager l’intimité de ce silence dont elle s’entoure soigneusement.
Comme ses livres, la musique l’invite au voyage. À faire de rencontres. À se souvenir d’amis lointains, certains soirs où, elle aimerait tellement avoir une présence, sans mots. Juste l’envie d’entendre quelqu’un d’autre respirer, pour se dire qu’elle est toujours vivante. Que tout l’amour qu’elle transporte dans son cœur n’est pas un fardeau mais un partage.
Certains soirs c’est sûr, elle se rappelle des amants à qui elle s’est offerte comme un cadeau et qui se sont envolés, depuis, vers d’autres corps, comme des oiseaux sans nid.
Elle traîne encore dans ses souvenirs quelques amours inachevées dont seules les guitares de Jess Cock, ou bien de Vicente Amigo viennent lui rappeler quelques frissons.
Mais elle ne regrette rien. Pas plus ses anciens amants que toutes ces fois où, enivrée par le vin d’Eros, elle a voulu croire que l’amour, le vrai, était au bout des caresses.
Après tout, les hommes ne sont que des morceaux d’existence, quelque part dans sa vie, comme des poussières d’étoiles perdues dans l’univers de ses silences. Son amour est ailleurs, parmi ses livres, dans le silence qu’elle meuble, jour après jour, au gré de ses humeurs. Dans les mots qu’elle sème dans son immense jardin, fleuri de mil tendresses, malgré ses blessures. Dans sa liberté fière d’être et d’exister, comme si vivre uniquement lui était insuffisant.
Il m’arrive de la croiser, certaines nuits de pleine lune où elle n’arrive pas à s’endormir à cause des blessures trop profondes et trop brûlantes que seule l’eau pure de ses larmes arrive encore à apaiser.
Et même si elle vous dit, le cœur blessé, qu’elle ne tombera plus dans le piège des sentiments, je sais qu’elle sait qu’elle ira croire une fois encore. Juste une dernière fois encore. Toujours. Une dernière fois encore.
Je l’observe. Appaisée en train de lire une lettre d’un ami lointain, et je crois qu’il serait difficile de vous l’expliquer. Mais je crois que je la connais si bien, que je saurais deviner la couleur de son silence et le parfum qu’elle respire, rien qu’en lui caressant le visage du bout de mes doigts fragiles.
Comment by Armando — 14 mai 2007 @ 16:45
UNE GOUTTE SALÉE
Elle glisse tout le long du sillon familier
Et poursuit le chemin aux commissures des lèvres;
Puis tombe silencieuse sur le bout de papier
Que tient Évangéline au front brûlant de fièvre.
Des nouvelles de lui arrivent beaucoup trop tard.
Elle fut tant attendue cette lettre d’amour!
Elle fut tant espérée depuis ce grand départ!
Le coeur a des hoquets; le chagin est si lourd.
C’est la fin passionnée de la vie amoureuse
D’une femme blessée d’un mal insoutenable.
Maintenant elle choisit la solitude heureuse
Et l’ivresse des livres aux joies intarissables.
Dernier reniflement en repliant la lettre.
Un soupir délivre sa poitrine oppressée.
Une larme culbute avant de disparaître
Sur sa langue qui lèche le nectar salée.
Flairjoy
Comment by Flairjoy — 15 mai 2007 @ 9:02
Ils sont là,enlaçés, tout les deux à découvrir la nouvelle toile de Lali….lui, penché au dessus de son épaule, à tout de suite remarqué les reflets de lumière (zénitale vu l’ombre dans la nuque) dans sa robe….elle est fascinée par les cils orange de la dame qui lit, et le cocon de lumière qui l’entoure, cette première couche blanche-lait qu’elle voit depuis quelque temps chez quelques gens. Le peintre l’a-t-il vu ,lui aussi ? Ce truc bizarre qui fait rayonner ? Si bien qu’il en a choisi de ne pas nous offrir la couleur de ses yeux…les miroirs de l’âme.Le coucou chante dehors, elle lit ,il peint et l’harmonie du moment se colle sur la toile…Eux ?Ils sont là,heureux, enlacés, et se disent que quand même…merci Lali!
Comment by cath — 17 mai 2007 @ 3:18