Le rêve de Lamartine
Rêve d’automne
Salut! bois couronnés d’un reste de verdure!
Feuillages jaunissants sur les gazons épars!
Salut, derniers beaux jours! le deuil de la nature
Convient à la douleur et plaît à mes regards!
Je suis d’un pas rêveur le sentier solitaire,
J’aime à revoir encore, pour la dernière fois,
Ce soleil pâlissant, dont la faible lumière
Perce à peine à mes pieds l’obscurité des bois!
Oui, dans ces jours d’automne où la nature expire,
A ses regards voilés, je trouve plus d’attraits,
C’est l’adieu d’un ami, c’est le dernier sourire
Des lèvres que la mort va fermer pour jamais!
Ainsi, prêt à quitter l’horizon de la vie,
Pleurant de mes longs jours l’espoir évanoui
Je me retourne encore et d’un regard d’envie
Je contemple ses biens dont je n’ai pas joui!
Peut-être l’avenir me gardait-il encore
Un retour de bonheur dont l’espoir est perdu?
Peut-être dans la foule, une âme que j’ignore
Aurait compris mon âme et m’aurait répondu?…
La fleur tombe en livrant ses parfums au zéphyr;
A la vie, au soleil, ce sont là mes adieux;
Moi, je meurs et mon âme au moment qu’elle expire,
S’exhale comme un son triste et mélodieux.
(Alphonse de Lamartine)
*toile de Dan Beck
