Lali

15 mars 2013

À la nuit montante 7

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 23:59

Ce bleu dont tu as rêvé

Ce bleu dont tu as rêvé
ne désignait peut-être
que l’extrême pointe d’un pays
d’où l’on ne revient pas.
Rien de très certain,
mais dont la vérité
importe autant
que le passage d’un oiseau sur la glace.

Ce bleu, sais-tu
s’il se nomme ainsi?
s’il se regarde comme il convient
avec cette émotion
dont se chargent les visages
les plus essentiels?

Max Alhau, À la nuit montante

*choix de la lectrice de Ricardo Cejudo Nogales

Une voix qui porte et qui touche

Filed under: À livres ouverts — Lali @ 19:24

La comédienne, slammeuse, peintre et poète Natasha Kanapé Fontaine, Innue de Pensamit, 21 ans, possède une telle maturité d’écriture qu’on a peine à croire qu’elle est si jeune.

Mais la jeune femme porte sur elle le poids des siens, de leur histoire et de la sienne, ce qui confère à N’entre pas dans mon âme avec tes chaussures une force et une énergie peu commune.

Les visions anciennes
mêlent à nos doigts lacés
les baisers du soir

aliénés

affirme-t-elle, émue, touchée, grave, tandis que surgissent d’autres mots, où se mêlent espoir et nostalgie :

J’attends la brûlure du nerf
achever mon éveil
mon manteau

les feux de l’aube
viendront
briser les vents de ton hiver

Ses racines innues sont là, fortes, imprégnant chacun des mots, leur course effrénée, dans les images qui se créent et se tissent sous nos yeux, alors que nous lisons tout haut ses mots qui deviennent facilement nôtres tant ils sont universels :

Première lueur
je ne sais pas
où je m’en vais
le soleil se tient droit
sur la mer

les iris
brûlés de lumière
je m’enivre
d’insouciance.

Ou plus près de soi quand ils expriment l’indicible :

Trop longtemps
j’ai porté mon canot
en des forêts citadines
mon pays m’appelle
mon pays me revient
j’achève mon exil
pour un retour
tremblant.

Une voix est née, a jailli. Forte, puissante, pour qu’un peuple ne tombe pas dans l’oubli, pour qu’une femme se fasse porte-parole de ceux, trop nombreux, qui se taisent, en cherchant sa propre voix. Une voix, un cri, qui ne veut plus s’éteindre.

Natasha Kanapé Fontaine n’est pas une étoile filante. Elle éclaire la poésie innue et la poésie tout court d’une lumière qui lui est propre.

Texte publié dans

Ce que mots vous inspirent 882

Filed under: Ce que mots vous inspirent,Couleurs et textures — Lali @ 8:00

Ce ne sont pas les grands événements qui déterminent la marche du monde, mais les petits accidents de parcours. (B. Traven)

*toile de Jean Commère