Un parfum de chèvrefeuille
Comme il me suffit de peu pour rêver… Un tube de crème Yves Rocher et ça y est !
Et me voilà en Bretagne, dans les jardins de La Gacilly, où l’entreprise cosmétique est installée, là où pousssent presques toutes les fleurs et les plantes qui serviront à fabriquer une lotion hydratante, un gel douche ou un masque.
C’était en 1981, ou 1982, je ne sais plus. C’était avant que les produits Yves Rocher ne traversent l’océan. C’était l’époque où je découvrais le chèvrefeuille.
Le beau temps s’était posé sur ce village de Bretagne. Et nous profitions du ciel bleu pour découvrir la luxuriante nature, de village en village, Monique et moi, avec Chantal pour guide, une Chantal si éprise de sa Bretagne qu’elle n’a pas été capable de rester bien longtemps en banlieue parisienne: elle asphyxiait. Pas pour survivre, mais bien pour vivre, il lui faut sa Bretagne, l’air marin, les terres, les pierres, les légendes de croque-mort, les crêpes et les fruits de mer. Il lui faut aussi ces villages, comme La Gacilly, pour ne nommer que celui-là. Elle appartient à sa terre. Et c’est pour cette raison qu’elle est incapable de vivre ailleurs.
Mais moi, est-il une terre à laquelle j’appartienne ? Est-il un endroit dont je puisse dire, ici et pas ailleurs ?
Je me pose parfois cette question. Je suis née à Montréal, une nuit de pleine lune d’août 1961. Depuis, mes pas m’ont entraînée vers les quatre points cardinaux. Et ici et là, j’ai sûrement laissé un peu de moi, même si j’ai emporté des images qui me suivent sans cesse.
Où que je passe, je suis chez moi tout en me sachant étrangère. Je suis chez moi, parce que je pose les pieds là, je m’arrête, je regarde, je m’imprègne des lieux. Mais ce n’est pas chez moi, je ne fais que passer pour plus ou moins longtemps. Être chez soi dans un endroit qui n’est pas chez soi, voilà peut-être l’incohérence de la situation. Et pourtant, à mes yeux, tout cela fait sens.
Ou peut-être y a-t-il une raison bien simple. Je me sens chez moi où que je sois parce que je suis là par choix. À Montréal, aujourd’hui, à Bruxelles il y a huit mois, à la Gacilly il y a plus de vingt ans.
La vie, certains jours, ce n’est peut-être qu’un parfum de chèvrefeuille.