Marche forcée 2
Bien longtemps je t’ai celée…
Bien longtemps je t’ai celée,
comme l’arbre en son feuillage
le fruit lentement mûri;
et, lucide fleur de glace
sur le miroir de la vitre,
dans mon esprit tu fleuris…
Et je sais ce que veut dire
ta main dans ma chevelure;
je porte en moi de tes pas
cette infime fléchissure,
et la courbe de tes côtes
s’il advient que je l’admire
comme un qui s’y reposa,
pur miracle qui respire;
dans mes rêves bien souvent
mes deux bras deviennent cent
et comme un dieu dans un rêve
dans mes cent bras je te prends.
Miklós Radnóti, Marche forcée
*choix de la lectrice de Frances Strain