Lali

4 juillet 2010

En vos mots 169

Filed under: Couleurs et textures,En vos mots — Lali @ 8:00

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Chaque dimanche, vous avez rendez-vous avec une toile. Sans savoir à quoi elle ressemblera. En vous demandant si elle vous inspirera. Parce que la toile du dimanche est là pour vous, pour vos mots, vos histoires, vos poèmes, tout ce qu’elle voudra bien vous livrer.

La toile de Carlos C. Lainez vous appartient donc pour sept jours puisqu’aucun commentaire ne sera validé avant, comme le veut l’habitude depuis plus de trois ans.

Puisse-t-elle vous donner envie d’écrire, de la raconter, de vous raconter. Juste pour le plaisir.

4 commentaires »

  1. Ceci me ramène au plaisir, l’ivresse, la consolation, de lire, lire, lire, lire un livre par jour lorsque j’étais encore enfant. Et plus encore, avec une lampe de poche, la nuit venue, au-delà des heures autorisées, dans son lit, sous le drap avec une lampe de poche. Le coeur palpitant, guettant le moindre mouvement dans la nuit, le goût augmenté de lire mêlé à l’interdit, la désobéissance plus exactement. Cet appétit de lire à diminuer lorsque la vie active (comme l’on dit sobrement) a dévoré mon temps. Voilà.

    Comment by LOU — 4 juillet 2010 @ 15:00

  2. Les grandes avenues étaient désertes depuis que les voitures étaient parties vers leurs habituelles destinations de vacances. Loin. Suffisamment loin pour rendre à la ville un air paisible et nonchalant comme si c’était dimanche matin tous les jours.

    J’avais décidé de visiter un de ces lieux pour l’enfance en difficulté, où des adultes à bout de patience cherchent à mettre des enfants dans le droit chemin, sans jamais se demander si le chemin est si droit que cela. Je devais leur parler de mon expérience et leur faire comprendre les vicissitudes de l’existence. Ce qui les attend s’ils continuent à faire le mariole et tant d’autres choses qui m’ont toujours semblé si dérisoires que moi-même j’ai mal à la tête quand je m’entends parler, alors les mômes…

    J’avais dans ma liste 33 enfants alors que dans la salle je n’en comptais que 32. J’ai demandé au principal s’il y avait une erreur et il m’a répondu, sèchement et fermement, que Claudia était punie et qu’elle ne serait pas là.

    J’ai hésité un peu et j’allais questionner le principal quand une voix m’a invité en disant : C’est à vous maintenant… les enfants sont prêts.

    Malgré les applaudissements nourris des élèves, j’estimais que j’avais été très mauvais dans ma prestation. La punition de Claudia avait complètement assombri mon esprit.

    -Monsieur le principal, je vous prie…
    -Vous avez été magnifique…
    -Claudia… je peux la voir?… je suis venu pour parler à tous les enfants…

    Le principal m’a regardé avec dépit et après un grand soupir m’a envoyé : Si vous y tenez… mais vous allez être déçu… c’est une tête de mule… on obtient rien d’elle…

    -Bonjour Claudia.
    Mes mots se sont envolés dans la pièce pendant que son regard silencieux et triste se demandait ce que je lui voulais.

    -Je m’appelle Antoine. Et ma vie est de me promener d’école en école et de raconter un peu ce que j’ai vécu. Tu sais, pour que les enfants ne traversent pas les mêmes enfers que j’ai connus.

    Son regard était immobile. Comme les regards de ces poupées de porcelaine qu’on croit vivants mais dont on n’est pas très certains. Je l’ai dévisagée en silence jusqu’à ce que j’entende miauler. Claudia a souri.

    « C’est qui lui?… » lui ai-je demandé.

    -C’est Pacha. Mon ami Pacha qui vient me visiter chaque fois que je suis punie.
    -Comme moi, quoi….
    -Non, pas comme vous. Pacha vient toujours me visiter.
    -C’est vrai. Tu as raison. Et tu es punie souvent ?….

    Claudia a replongé dans le silence et son regard est de nouveau devenu lointain. Sans doute que ma question avait été un peu trop indiscrète. Ou indécente. Ou tout simplement Claudia estimait-elle que c’était trop tôt pour m’offrir des réponses.

    Nous sommes restés un certain temps en silence. De temps en temps, nous nous regardions mais sans mots. Mes sourires étaient tous sans effet. Claudia semblait se fondre dans le temps qui passe. Sans plus. Être là. Comme le temps. Insaisissable.

    -Tu connais Enid Blyton?…
    -Qui ça?
    -Enid Blyton. C’est une écrivaine anglaise. Quand j’avais ton âge et quand on me punissait, j’avais toujours un livre d’Enid Blytonsur moi. Ça racontait les aventures de cinq enfants et un chien et j’aimais beaucoup ça. Puis les punitions étaient moins pénibles. Si tu veux… J’en garde toujours un sur moi… Tu sais, au cas où je me trouve coincé quelque part… Tu veux?…
    -Vous me le prêteriez ?…
    -Bien sûr… Et comment… Regarde, dans celui-là ils vont avoir affaire aux pirates de l’air…

    Claudia a tendu la main en tremblant un peu. Elle a pris le livre et a aussitôt commencé sa lecture. Comme une assoiffée renversant sur soi un abondant verre d’eau fraiche.

    Je suis resté là. Assis. En silence. À la regarder lire. Elle avait l’air si paisible. Peu à peu son visage s’illuminait et il ma semblé l’avoir vue sourire. Je n’osais pas s’interrompre, cependant l’heure avançait et il me fallait partir.

    « Bon Claudia… Je vais te laisser. Je dois m’en aller. Tu peux garder le livre. Je te l’offre », lui ai-je dit en souriant…

    Claudia a levé ses yeux de sa lecture et m’a regardé intensément. Ses yeux sont devenus brillants comme s’ils retenaient des larmes, puis d’une voix frileuse elle a murmuré : Et vous allez revenir?…
    -Certainement Claudia, certainement. Tu voudrais bien que je revienne pour qu’on soit un peu ensemble?…

    Elle a hoché sa tête en guise de réponse positive, sans doute pour que je ne perçoive pas sa voix tremblante.

    -Alors je viendrai, Claudia. Bientôt…
    -Promis?…

    Je l’ai regardée et j’ai à mon tour hoché la tête en guise de réponse positive. Que pouvais-je lui dire d’autre ?

    Comment by Armando — 9 juillet 2010 @ 11:45

  3. Juliette a enfilé son très gros pull violet à pois blancs qui lui arrive jusqu’aux pieds, s’est assise dans son fauteuil sur trois encyclopédies. C’est sa manie à elle de lire le soir lorsqu’elle rentre de son travail et surtout le week-end. Il faut dire que Juliette possède un pull très épais pour l’hiver et un plus léger pour l’été mais la couleur et les pois sont identiques. Elle a besoin de cette teinte pour lire. Au début, le chat trouvait cela bizarre mais il s’est fait une raison. Pourquoi pas, après tout, si elle se sent bien ainsi…

    Caramel n’est plus surpris des excentricités de sa maîtresse mais de temps à autre, il soulève une paupière, la regarde et retourne dans le monde des rêves. En fait, il aime bien s’installer auprès de Juliette. Même s’il dort dans la journée, il trouve le temps long. Parfois, elle lit à haute voix sans s’en rendre compte et à ce moment là, il lève ses oreilles et peut entendre ceci, un poème de Charles Baudelaire

    Le Chat

    De sa fourrure blonde et brune
    Sort un parfum si doux, qu’un soir
    J’en fus embaumé, pour l’avoir
    Caressé une fois, rien qu’une.

    C’est l’esprit familier du lieu;
    Il juge, il préside, il inspire
    Toutes choses dans son empire;
    Peut-être est-il fée, est-il dieu?

    Quand mes yeux vers ce chat que j’aime
    Tirés comme par un aimant,
    Se retournent docilement
    Et que je regarde en moi-même,

    Je vois avec étonnement
    Le feu de ses prunelles pâles,
    Clairs fanaux, vivantes opales,
    Qui me contemplent fixement.

    Il aime la douce voix de Juliette. Caramel ronronne, il est heureux!

    Comment by Denise — 10 juillet 2010 @ 10:59

  4. Ensemble, en silence

    Il est si doux Piccolino, si merveilleusement doux…
    D’abord il ne parle pas. Il n’exige rien. Il ne juge pas.
    Et nous nous comprenons.
    J’aime sentir sa présence, endormi sur mon lit, installé sur ma chaise, ou lorsqu’il me suit, dans le dédale de vieux poiriers abandonnés, vers cette étendue d’herbes hautes et sauvages. Une légère myopie embrouille de douceur le foisonnement de tiges qui ondulent comme une petite mer. Assise sur une pierre, je prends toujours plaisir à y tremper les yeux en compagnie de Piccolino, assis lui aussi, quelques mètres plus loin.
    Et nous restons là, tous les deux. Ensemble, en silence.

    Aujourd’hui, il n’est pas là.
    Je le recherche du regard derrière la vitre. Je l’appelle plusieurs fois en pépiant son nom comme une ritournelle, avant de retourner dans ma chambre. Le petit ourson rose sommeille tout seul sur le lit. Il a cet air si tendre et si triste que j’aimerais le serrer fort dans mes bras…
    Je regarde par la fenêtre le jour qui commence à décliner. Les petites mésanges, derrière le voilage, voltigent d’une branche à l’autre. Et c’est Piccolino que je vois soudain surgir dans le jardin. Je cogne au carreau. J’admire en silence sa beauté, sa liberté… Il me semble, à cet instant, tellement plus facile d’être un chat, ou un oiseau, ou même une fleur… Mais le friselis de l’air, dans les feuilles du lierre, me ramène à la fenêtre, à la chambre.

    Il commence à faire sombre.
    Je me décide à allumer la petite lampe. Le temps de chercher mon livre – il y a toujours du bazar dans cette chambre! – et de me pelotonner au fond du large fauteuil rouge que j’entends Piccolino miauler à ma fenêtre!
    Je l’adore ce chat…

    Après un bain de ronronnements et de câlins, je me recroqueville, au plus loin, je me fais toute petite dans ma grande robe de chambre couleur de violette pour lui laisser le plus de place possible…
    J’ouvre enfin mon livre, rassurée, tellement rassurée de le sentir à mes côtés…
    Et je me replonge dans l’histoire… La belle histoire d’une danseuse… La danseuse qui rêve de devenir étoile… Danseuse Etoile… Quel joli nom…

    Comment by macile — 10 juillet 2010 @ 16:40

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