Lali

22 septembre 2024

En vos mots 909

Filed under: Couleurs et textures,En vos mots — Lali @ 8:00

Même s’il a fait très chaud ces derniers jours, on sent que l’automne s’installe. Il y a déjà de nombreuses feuilles au sol même si les arbres sont encore pour la plupart encore verts. D’où le choix de cette illustration de Laura Pacheco cette semaine.

Comme toujours, aucun commentaire ne sera validé avant dimanche prochain, ce qui vous laisse le temps de lire les textes déposés sur la scène livresque de dimanche dernier et d’écrire quelques lignes.

D’ici là, bon début d’automne à tous les envosmotistes et à celles et ceux qui les lisent. Et rendez-vous dimanche prochain!

2 commentaires »

  1. Tout le monde le lui a fermement déconseillé. La traitant de folle, d’écervelée, d’inconsciente, et autres noms d’oiseaux. Lui assénant qu’il ne faudrait pas venir se plaindre ensuite d’être enrhumée, ou pire.
    Mais elle les entendait à peine. Préférant justement écouter les oiseaux. Sa décision était prise, et plus ferme que tout ce qu’elle pouvait capter comme cris l’accusant d’être déraisonnable.
    Elle avait besoin d’air. Et surtout qu’on ne lui dise pas sans cesse ce qu’elle devait faire. Ou ne pas faire.
    Non, c’était vrai, nous ne jouissions pas d’un été indien. Oui, l’automne avait pris ses aises. Non, la météo n’annonçait rien de bon. Oui, il allait pleuvoir énormément. Mais on ne prévoyait tout de même pas de tempêtes, et elle ne semblait pas prendre de risques démesurés.
    – Et tu vas faire tous ces kilomètres pour te retrouver dans un trou perdu, où l’humidité constante ne te permettra même pas d’aller te promener?
    Elle en avait entendu de toutes les couleurs. Ou plutôt, des réflexions toutes plus ternes les unes que les autres, sans joie. Comme si octobre n’était pas un mois qui nous en réserve plein, des couleurs. Quand les feuilles se teintent de toutes les nuances de rouge, de jaune, d’orangé.
    Les commentaires s’étaient cependant révélés plus mordants encore quand elle avait exprimé à l’étonnement de tous qu’elle n’avait pas nécessairement l’intention d’aller se balader. Et que venir enfin à bout d’une partie de sa pile à lire lui serait un plaisir incommensurable, abritée sous sa tente en pleine campagne, une boisson chaude à portée.
    – Heureusement, tu pourras toujours te réfugier chez Joëlle, qui te prête son bout de terrain! Puisque tu ne veux pas loger à l’hôtel ou prendre une chambre d’hôtes.
    Mais Clotilde n’a qu’une envie: camper seule, et tranquille. Même s’il est vrai qu’elle prendra volontiers un thé pour papoter avec Joëlle, qui est plutôt charmante. Tellement sympa d’ailleurs qu’elle comprend très bien, elle, le besoin de Clotilde de s’isoler, et de lire tout son saoul dans le calme et la solitude retrouvée. C’est pour cela que Clotilde s’est tournée vers Joëlle, chez qui elle savait pouvoir trouver un emplacement qui lui convienne. Et la tranquillité.
    Clotilde, couverte de plusieurs chandails et enfoncée dans son moelleux sac de couchage, vient à l’instant de s’attaquer avec délice au premier roman de la pile. Le jour de l’arrivée est toujours le meilleur, et elle le savoure. Parce que le premier jour, on a encore la perspective de jouir de tous les autres. Et l’illusion de pouvoir terminer la pile.

    Comment by anémone — 26 septembre 2024 @ 11:54

  2. Lisbonne (ou peut-être ailleurs), 29 septembre 2 024

    Ma chère B.

    Etrange nuit. Rachmaninov. Somewhere in time. Il y a des nuits comme ça. La musique s’invite dans mon sommeil.

    Je ne rêve pas. Je me promène. Avenue du Mont-Royal. Les gens sont partout pareils. Ou presque. Un presque si loin d’être un à peu près, un quasi ou en encore un pas exactement. Ce presque est comme le pas dans un abîme qui fait la différence entre ceux qui voudraient être et ceux qui sont ce qu’ils sont. Singuliers. Uniques. Beaux et libres. Peut-être heureux.
    Je croise une fille aux cheveux mi-bleus mi-orange et mi-autre chose. Un mélange, comme un arc-en -ciel. Les yeux marqués d’un noir expressif. Ses lèvres rouge vif. Et son sourire soleil. Impertinent et pudique. Je l’aime. Elle ne le saura jamais.

    Étrange nuit. Concerto pour piano no 2, op. 18 en do mineur. Toujours Rachmaninoff. Maison du Meunier. Je pique-nique. De toute ma pauvre existence, je n’ai jamais su ce que c’était de manger sans façon. Comme ça. En riant. En se disant des choses banales. Ou peut-être pas si banales qu’on le dit. L’amitié se tisse de cela aussi. De ces choses qu’on dit sans importance. Il me semble que j’esquisse un sourire dans mon rêve. Il n’y a dans les rêves qu’on pique-nique pour la première fois. Comme dans les films en noir et blanc. Années 1950. Genre Boulevard du crépuscule, Une place au soleil, et tout ça.

    Un chemin dans une forêt. Une rivière qui s’en va vers son destin. Et la tendresse du temps qui passe. Comme une caresse. On ne voudrait pas se réveiller. Pas de suite. Rêver encore un peu. Juste un peu. Encore. Avant que les bruits de la vie ne viennent me réveiller.

    Ciel. Toujours Rachmaninoff. Que c’est doux… Est-ce qu’on peut aimer juste parce qu’aimer existe. Rien d’autre. Aimer comme ces enfants qui aiment voir s’envoler les oiseaux, sans savoir pourquoi. Sans imaginer qu’un jour on viendra leur enseigner à s’interroger sur le pourquoi des choses. Pourquoi le ciel. Pourquoi les silences. Pourquoi l’amour. Tant de pourquoi tellement inutiles qui nous empêchent d’être heureux.

    Prendre la main de quelqu’un dans la sienne et se dire qu’il n’en faut pas plus pour être heureux. Juste parce qu’on aime et que dans les rêves les mots se taisent. C’est peut-être pour cela que ce sont des rêves. C’est sans doute à l’absence de mots qu’on reconnaît que ce sont des rêves.

    Il me semble que cela faisait au moins une éternité que je ne rêvais pas.  Et dans ma tête : « Je ne veux pas dormir ce soir. Je n’veux pas qu’il finisse. Le beau jour d’aujourd’hui… » Sacré Ferland. Ce crétin va encore me faire pleurer.

    Merveilleuse nuit. Ce n’est qu’un rêve. Rien qu’un rêve. Demain, c’est sûr, je me réveillerai. Et je m’en irai de mes pas déambuler par les rues de la ville et je penserai à mon rêve. Ä Rachmaninov. Aux promenades en forêt. À Ferland et à toutes ces belles choses qui n’existent que dans mes rêves. Et puis avenue du Mont-Royal encore un peu. Juste un peu. Avant la nuit.

    Je t’embrasse.

    A.

    Comment by Armando — 26 septembre 2024 @ 18:41

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