En vos mots 783
Alors que je viens à l’instant de valider les textes que vous avez déposés sur la toile de dimanche dernier, que je vous invite à lire et à commenter, je vous propose cette semaine de vous attaquer à une illustration de l’artiste britannique Jess Purser.
Comme le veut l’habitude, aucun commentaire ne sera validé avant dimanche prochain, ce qui vous laisse amplement de faire vivre ce passage tiré des Liaisons dangereuses ou de donner voix à cette lectrice.
D’ici là, profitez bien de la dernière semaine d’avril et retrouvons-nous ici dans une semaine pour prendre connaissance des textes proposés par les envosmotistes.
Le vicomte de Valmont à la marquise de Merteuil:
Permettriez-vous chère marquise que je vous effeuille?
La marquise d’un air fourbe et froid répond: je n’ose,
Ou recouvrez-moi par milliers de pétales de roses.
Multipliant les vices tout comme les égarements,
Il lui arrivait fréquemment de se tromper de roman.
Ainsi projetait-elle de séduire Vallombreuse,
Vu qu’il aimait lui aussi les liaisons dangereuses.
Vous savez tout comme moi que l’histoire finit très mal:
A force de brasser le vice, on en devient sale.
Plutôt que Merteuil, Valmont, ou d’autres viles carcasses,
J’ai toujours un faible pour le Capitaine Fracasse.
Comment by anémone — 29 avril 2022 @ 16:51
Enchainé à la dictature du temps, le calendrier indiquait l’arrivée de l’automne. Il prétendait que c’était pour dans quelques jours. C’était une loi astrologique. Le 21, c’est la fin de l’été. Point.
Pourtant, cette année-là, les couleurs d’automne se faisaient attendre.
Noémie me disait, avec gravité, que la planète déconne. On fait n’importe quoi. On se comporte comme des barbares. Nos existences sont devenues du charabia. On ne comprend plus rien.
Faut dire que quand Noémie partait dans ses joutes oratoires sur notre manière de nous comporter dans le monde, il était conseillé que je reste silencieux. Assis dans mon coin. En attendant de meilleurs moments.
D’autant plus que ma tablette d’une marque à la mode l’agaçait comme la souris grise énerve une lionne dans sa cage.
Et lorsque je lui disais que j’avais accès à tout, à la banque, à mes courriels, aux courses, aux jeux, aux bouquins, c’est certain que je l’entendais : Aux bouquins mon cul… de chez mon cul… espèce d’esclave informatique. Ce que tu as là, ce ne sont pas des bouquins, ce sont des merdouilles à lire. Des bouquins, c’est autre chose. Un bouquin, ça se respecte. C’est un truc vivant. On le respire, on le caresse, on le désire. On s’endort avec. Un bouquin, ça se déshabille lentement, au fil des pages, comme une danseuse de cabaret qui se fait désirer, avant de dévoiler ses secrets intimes. Rien à voir avec ta tablette à la con. Froide et inerte. Comme une coquille vide. Ton truc n’a même pas un marque-page pour veiller sur le dernier paragraphe qui s’est confié à ton regard… Connard.
Connard marquait la fin de son argumentation et marquait le début d’une période de silence, comme une pause dans la course du temps.
Embarrassé, je l’ai observée, heureuse de déballer sa pile de nouveaux livres. Comme si la terre s’était arrêtée de tourner.
J’ai regardé par la fenêtre. L’automne se faisait attendre. Je me suis dit que le calendrier ne servait plus à rien. Que Noémie avait sans doute raison. Nos existences sont devenues du charabia.
Comment by Armando Ribeiro — 30 avril 2022 @ 11:57