Ce mardi-là
Chaque semaine, ils s’accordent une demi-heure de conversation ou davantage loin des autres. Ils en profitent pour parler poésie et musique, et ils s’enflamment.
Ce mardi-là, il lui a dit que si elle était née à un autre siècle, elle aurait sûrement tenu salon chaque semaine afin de réunir musiciens, écrivains, peintres et sculpteurs autour d’elle, à la manière de George Sand.
Peut-être que certains l’auraient connue plus intimement, mais la plupart auraient rêvé que ça leur arrive. Or, elle n’aurait jamais avoué lequel comptait plus que les autres.
Et elle aurait déposé une sculpture d’elle nue lisant bien en évidence sur un meuble de la pièce où se réunissait sa cour, essentiellement composée d’hommes. Les quelques femmes qui auraient fait partie du groupe auraient admiré (ou envié) cette liberté dont elle usait sans modération.
Peu auraient compris qu’elle n’attendait d’eux qu’une chose : qu’ils la laissent lire.
*sur une sculpture de Jean Pierre Picheny