C’est à bien autre chose qu’un roman policier conventionnel que nous convie David Bélanger avec Métastases. En effet, pour son premier roman, le jeune écrivain – il n’a que 25 ans – a choisi l’humour, le regard de biais et même la dérision pour mettre en scène une enquête qui dérive et dévie pour nous entraîner sur des chemins dont seuls certains nous sont connus.
Tout cela commence par le meurtre d’Éva Burns, jeune et jolie jeune femme délurée, à la réputation quelque peu douteuse, auquel nous assistons carrément, le narrateur ayant choisi de faire de nous des témoins quelque peu voyeurs d’ébats qui se terminent abruptement.
À coups de « vous » qui s’adressent au lecteur, alors que nous devenons les presque complices de ce qui vient de se passer sous nos yeux, le narrateur installe peu à peu son décor, choisit les acteurs et prépare sa mise en scène. Il y a, bien entendu, des enquêteurs plus vrais que vrais – en quelque sorte calqués sur ceux que nous retrouvons dans les polars de la Série noire ou dans certaines séries télévisées de l’époque où le « politiquement correct » n’était pas à la mode – que l’auteur désigne comme « le grand mentor » et « l’idiot sentimental ».
Il y aussi des indices qui ne mènent nulle part, des pistes imposées par la peur et l’esprit de plus en plus troublé par un cancer du cerveau dont les métastases se propagent partout, des moindres détails aux mécanismes criminels habituels dont on croit saisir le sens. Jusqu’à ce que tout se brouille, jusqu’à ce que l’enquête piétine tellement que le lecteur se demande si c’est là le sujet du roman ou bien autre chose qu’il est en train de découvrir au fil des pages.
Pas étonnant donc, dans ces conditions, que le lecteur et que l’enquête piétinent. Mais non sans occasionner un plaisir croissant pour le lecteur. Le ton, les jeux de mots, les clins d’œil faits à la littérature (pas juste aux romans policiers), les presque caricatures que sont les policiers de service, dont un des deux s’appelle Guy Descars, tout cela concourt à faire de Métastases un roman solide, presque brillant, même si pas vraiment un roman policier, ce à quoi s’attendait le lecteur.
Au fond, il n’est pas si important (ni grave) que le lecteur referme le premier roman de David Bélanger avec l’impression de s’être fait avoir parce qu’il a davantage assisté à un combat d’idées et de mots qu’à l’arrestation d’un criminel. Il y a, avouons-le, un côté jubilatoire à se faire avoir quand c’est fait avec habileté.
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