Il a suffi d’un écart pour que tout bascule et que Laure paie les conséquences de son inconséquence le reste de sa vie. Tout ça parce que cet été-là, celui qui a suivi le décès de sa mère, Laure était perdue, prête à faire n’importe quelle bêtise, parce qu’elle avait 19 ans et voulait à tout prix goûter à la liberté. Parce qu’elle n’a pas pensé qu’on pouvait se faire prendre en jouant avec le feu. Et pourtant, ce jour-là, c’est elle qu’on a arrêtée pour trafic de drogue, pas celui pour qui elle avait fait une livraison, lequel en avait bien évidemment profité pour prendre le large. Ce qu’elle fera à son tour grâce à une évasion organisé par son grand-père quelques mois plus tard.
Mais comment peut-on vivre avec une nouvelle identité? Comment peut-on faire abstraction de son passé? Dans quelle mesure peut-on s’en inventer un? C’est à tout cela que se trouve confrontée Laure pendant des années. Avec en permanence l’inquiétude qui empoigne le ventre. Même si vingt ans ont passé. Même si elle a toujours mené une vie exemplaire pour se racheter de sa faute.
On peut changer de nom, de coupe et de couleur de cheveux. On peut même fournir à qui en veut des détails inventés du premier au dernier. Mais on ne peut pas changer pour soi, intimement, ce qu’on peut modifier pour les autres. Il reste à jamais en soi une trace de ce qu’on a fait, de ce qu’on a été, des gens qu’on a aimés. Il reste à jamais dans les silences du quotidien les cris contenus. Parce qu’on a voulu goûter à l’insouciance et à la liberté. Parce qu’on a perdu l’insouciance et que la liberté a parfois un goût d’amertume quand la peur se met de la partie.
Michèle Halberstadt, qui a signé le très réussi Café viennois, a tissé avec Un écart de conduite une toile d’araignée efficace en même temps qu’elle a su exploiter sans prendre des chemins inutilement tortueux ce que la conscience finit toujours par nous imposer.