On peut tout quitter, partir loin de chez soi, il y aura toujours un pont qui nous unira à ce que nous avons été et à ceux qui nous ont forgés. C’est ce que je retiens du premier roman de Christine O’Doherty, Le pont de l’Île. Un roman sensible, émouvant, tout en nuances, mettant en scène une femme à qui tout semble avoir réussi. Du moins aux yeux de ceux qui s’attardent sur ce qui est visible : la belle maison, un mari, une carrière réussie.
Mais voilà. Là n’est pas l’essentiel. C’est pourquoi Gabrielle prend un jour le large. La vente de ses parts à ses associées lui permettra de vivre quelque temps sans se préoccuper d’autre chose que de faire le point. De comprendre pourquoi plus rien ne va. D’analyser les sources de ce malaise qui l’habite.
Et c’est à l’Île-du-Prince-Édouard, dans une petit village de pêcheurs où la vie a le rythme qui lui convient, face à la mer, que Gabrielle va petit à petit renouer avec elle-même à mesure que le passé vient se poser dans ses mots, puisque ce séjour qui s’étire lui donne l’occasion d’écrire, de faire le tri de ses souvenirs, de faire surgir des scènes, des gens, et de constater que tout ce qu’elle a retenu, tout ce à quoi elle tient, n’a rien à voir avec sa vie de femme. Seules la petite fille et l’adolescente en elle demeurent.
Et c’est de retour auprès des siens, à l’occasion des fêtes de fin d’année, après des mois de silence, que Gabrielle sera en mesure de comprendre ce qui l’a poussée à partir. Ce qui l’a retenue de ne pas le faire avant. Ce à quoi elle aspire maintenant. Il fallait juste qu’un jour elle franchisse le pont qui la ramène à elle-même.
Roman intimiste qui mêle habilement narration et pages d’écriture dans lesquelles Gabrielle évoque des moments forts, des vacances, des livres, Le pont de l’Île révèle une nouvelle voix, une écriture toute en nuances, une auteure à suivre.
Titre pour le Défi Premier Roman