Lali

26 novembre 2012

Oublions Marie Lebey!

Filed under: À livres ouverts — Lali @ 19:57

Je ne sais pas ce que Marie Lebey a cherché à faire avec Oublier Modiano, sinon se comparer à celui qui, selon elle, l’a sauvée grâce à ses livres. Je sais seulement qu’il y a quelque chose de malsain dans son entreprise et que je n’aime pas le fait qu’elle ait traqué chacun des indices que l’auteur de La place de l’étoile — et de tant d’autres romans qui m’ont bouleversée depuis ce jour d’automne de l’année 1978 où il est entré dans ma vie — a semés au fil de ses livres. Pas plus que je n’aime l’idée qu’elle ait fait le tour des lieux qui ont touché de près l’écrivain, qu’elle les ait pris en photo et que son éditeur exhibe ces endroits sur la page consacrée au roman de Marie Lebey.

Le fait qu’elle entremêle ses propres souvenirs à ceux relatés par Patrick Modiano dans ses romans rend le lecteur inconfortable. Le fait aussi qu’elle banalise ceux-ci d’une certaine façon afin de se mettre bien en évidence ajoute au sentiment d’inconfort qui s’amplifie au fur et à mesure que nous avançons dans ce roman se voulant intimiste.

Oublier Modiano, c’est un roman sur Marie Lebey. Sur elle, elle et toujours elle. Et rien qu’elle, qui n’a de cesse de faire de sa vie un roman depuis Dix-sept ans, porte 57, dans lequel elle raconte ce qu’elle a vécu avec le chah d’Iran.

La presse a encensé le livre. Comme si l’auteure était le Modiano féminin que tout le monde attend depuis des lustres. Mais non. Marie Lebey est simplement une écrivaine qui a besoin d’attirer l’attention. Depuis toujours. Elle a choisi Modiano parce qu’il a perdu son frère et elle sa sœur. Peut-être aussi parce qu’elle aimait l’univers parfois glauque dans lequel gravitent ses personnages. Et puis, parce que, ne nous le cachons pas, Modiano sur une couverture, ça attire l’attention.

Je n’ai pas compris la démarche pas plus que je n’ai compris pourquoi elle a choisi de faire de son écrivain fétiche une sorte de frère d’armes, alors qu’elle aurait pu aller plus loin dans la fiction et ne pas égratigner au passage celui qui a été si important pour elle.

Mais au fond, le débat est peut-être ailleurs. Pas dans l’exhibitionnisme de Marie Lebey. Pas dans sa façon de s’approprier la vie de Modiano. Pas dans le fait qu’elle mélange tout. Mais ailleurs. En moi. Là où une voix dit haut et fort : ne touchons pas à Modiano.

Oublions Marie Lebey.

Bientôt la neige…

Filed under: Mon Montréal,Signé Lali — Lali @ 16:17

Même si certaines feuilles refusent de tomber, il y a dans l’air une odeur qui ne trompe pas. L’hiver est à nos portes.

Anecdotes de réviseure 23

Filed under: Anecdotes de réviseure,Couleurs et textures — Lali @ 11:55

Il y a des choses que je ne comprendrai décidément jamais. Même avec la meilleure volonté du monde et en faisant preuve de toute la compréhension possible. En effet, est-il si compliqué que ça de transcrire des données d’un document à l’autre sans ajouter des S où il n’y en avait pas ou sans transformer les millions en milliards? Est-il impensable d’imaginer que les noms des intervenants cités pourraient un jour être orthographiés correctement?

Je ne parle pas uniquement des erreurs grossières — voire énormes — que je trouve dans les documents que je révise, mais aussi de celles qui font de plus en plus légion dans les articles des journaux et magazines, dans des communiqués destinés au grand public émanant de ministères, et même dans des programmes de spectacle d’orchestres reconnus.

Est-il vraiment insensé de rêver qu’un jour on pourra se fier à ce qu’on lit? J’en doute. Et ce, de plus en plus. Hélas.

*sculpture de Ron Ulicny

Ce que mots vous inspirent 805

Filed under: Ce que mots vous inspirent,Couleurs et textures — Lali @ 8:00

Chaque homme sait une quantité prodigieuse de choses qu’il ignore qu’il sait. (Paul Valéry)

*toile d’Alice Neel

25 novembre 2012

À voix basse 3

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 23:59

samedi matin

ton visage est toujours dans mes yeux
ton corps a déjà disparu
tout le long du parc portuaire
le fleuve soigne sa plissure verdâtre
j’ai le visage fissuré
par le souffle du vent d’automne
au bout de mes doigts
inscrit en chiffres gras
ton numéro de téléphone tourne
sans raison
je l’ai déchiqueté
jetant dans l’eau qui coule
tout plaisir de te revoir

à contre-courant
les liaisons refusées
poignée de confettis

Maurice Cadet, À voix basse

*choix de la lectrice de Joshua Reynolds Gwatkin

L’école des poètes 10

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 20:01

Quand un matin

Quand un matin notre maîtresse
Dit au terrible garnement
– Je suis belle, à quel temps est-ce?
L’écolier, sans ménagement,
rétorqua d,une voix cruelle :
– C’est du passé, Mademoiselle!

Daniel Bruguès
(extrait de L’école des poètes de Joël Sadeler)

*pour la lectrice de Maud Tousey Fangel

L’école des poètes 9

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 18:01

La poésie de juin

Je n’oublierai jamais la poésie de juin
sous les hauts tilleuls de l’école

Les moustaches du chat
sur l’hémistiche de Char

Le vent qui décoiffait la rime
se perdant sur le toit

Au-dessus de la haie des lauriers-palmes
le clocher de l’église attentif à nos âmes.

Et le cadran solaire
corrigeant les fautes de temps

Je n’oublierai jamais la poésie de juin
la poésie sous les tilleuls
ce n’était pas de la tisane…

Joël Sadeler, L’école des poètes

*pour le lecteur de Lisi Martin

L’école des poètes 8

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 16:01

Je caresse la mappemonde

Je caresse la mappemonde
Jusqu’à ce que sous mes longs doigts
Naissent des montagnes, des bois,
Et je me mouille en eau profonde
Des fleuves, et je fonce avec eux
Vers l’océan vertigineux
Débordant de partout mes yeux
Dans la fougue d’un autre monde.

Jules Supervielle
(extrait de L’école des poètes de Joël Sadeler)

9pour le lecteur de James Ormsbee Chapin

L’école des poètes 7

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 14:01

Par un point situé sur un plan…

Par un point situé sur un plan
On ne peut faire passer qu’une perpendiculaire à ce plan
On dit ça…
Mais par tous les points de mon plan à moi
On peut faire passer tous les hommes, tous les animaux de la terre
Alors votre perpendiculaire me fait rire.
Et pas seulement les hommes et les bêtes
Mais encore beaucoup de choses
Des cailloux
Des fleurs
Des nuages
Mon père et ma mère
Un bateau à voiles
Un tuyau de poêle
Et si cela me plaît
Quatre cents millions de perpendiculaires.

Robert Desnos
(extrait de L’école des poètes de Joël Sadeler)

*pour les personnages de Shinya Okayama

L’école des poètes 6

Filed under: À livres ouverts,Couleurs et textures — Lali @ 12:01

Je primevère

Je primevère
Tu pâquerettes
Il été
Elle bouton d’or
Nous feuilles d’automne
Vous bourrasques et grêlons
Ils ou elles glaçont
À tous les temps
Sur tous les tons
Le Bescherelle
Des conjusaisons

Marilyse Leroux
(extrait de L’école des poètes de Joël Sadeler)

*pour la lectrice de Frank Gardner

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