Un peu de poésie et de Bretagne 13
Et puis un soir un poème vient à nous qu’on sait qu’on répétera souvent, qu’il se posera sur nos lèvres sans qu’on s’en rende compte, parce que c’était celui-là et pas un autre. C’est ce qui est arrivé à la lectrice de Karin Wells quand elle a lu cet extrait de Fermé pour cause de poésie de Gérard Le Gouic.
Je voudrais chaque jour
penser un poème d’amour
et le dire
à voix basse à genoux
pour qu’il ne serve qu’une fois
comme la vague ou le grain de blé.
Je voudrais chaque jour
partager
un quart d’heure d’amour,
non point
une seconde,
comme la vie d’un étalon d’écume.
Mais l’amour mesure la distance
entre deux points d’amour,
il ne donne pas la profondeur
entre soi et l’infini,
mais l’amour n’est amour
que si l’on y pratique l’amour.
L’amour regarde la mer
comme le calendrier de nos solitudes
et se tourne à la nuit tombante
vers le feu dans les cheminées
qui dévoilera des ombres, des voix,
des séparations intérieures.
Je voudrais chaque jour
élever un poème d’amour
et le crier à tue-tête, à tue-cœur
pour qu’il serve cent mille fois,
pendant cent mille ans,
comme la vague et le grain de blé.