Le parc d’où je suis
Le parc Molson n’est pas le plus grand, ni le mieux situé, ni le plus particulier de Montréal, mais il est sûrement de tous les parcs celui auquel je suis le plus attachée. Peut-être bien parce que c’est le premier que j’aie connu, qu’il fait partie de ma vie comme une de ces traces qu’on n’efface pas.
Peut-être même a-t-il été un de ces lieux magiques qui font que je suis là aujourd’hui, puisqu’il faisait partie des promenades de mes parents bien avant ma naissance. Peut-être même, et même sûrement, se sont-ils abrités sous ce kiosque à musique et ont-ils écouté des fanfares certains dimanches: leurs yeux brillent d’un éclat extraordinaire quand j’évoque ce parc. Mais ces souvenirs sont à eux et jamais je ne leur demanderai si sous un arbre, nuit de pleine lune comme ce soir, ils se sont embrassés. Mais j’espère que oui.
Ce que je sais, c’est que pendant neuf mois, ce parc m’a connue avant que je ne le connaisse. Ce que je sais, c’est qu’avant d’y poser les pieds bien des années plus tard, puisque mes parents ont quitté le quartier lorsque j’avais huit mois, c’est dans une poussette, inconsciente de la beauté du parc, qu’il m’a été donné de d’abord le découvrir.
Je retourne de temps en temps fouler le sol comme on va sur les pas de ses racines. Ou j’y retourne juste par simple plaisir. Avec un regard attendri pour ces arbres immenses et protecteurs. Et là, je laisse le temps couler sur moi, je ne pense plus à rien, je goûte, je profite, je suis heureuse. Et s’il est magnifique, ce parc, quand il croule sous le vert de ses feuilles, il est splendide quand celles-ci se colorent, grandiose dans la blancheur de son manteau d’hiver et chargé d’espoir quand le printemps le guette.
Il est à lui seul le parc de toutes les saisons, de toutes mes saisons.